dimanche 1 mars 2015

5 avril 2011

La Louisiane
2ième partie



Les crevettes " Bubba Gump "

C'est aussi le pays des crevettes géantes. À tout les matins, les bateaux de pêche rapportent à quai, une manne de ces superbes crevettes comme dans le film de Forest Gump et pour 4,75 $, vous obtenez une livre de ces merveilles.
Un pur délice!

Du choix et surtout de la fraîcheur, on est loin des crevettes congelées.

Carole est photographiée devant le bronze de l'idole de son papa,
 Louis Armstrong.

La Louisiane c'est aussi la Nouvelle-Orléans avec son jazz, le majestueux fleuve Mississippi qui baigne au travers de 13 États américains et les non moins célèbres bateaux à aubes, comme dans les livres de bandes dessinées de Lucky Luke.

Les installations portuaires modernes du centre-ville.

Le fleuve Mississippi c'est comme le Danube bleu, c'est brun! Très brun sale, à ne pas s'y saucer les orteils. Nous rêvions de faire une croisette sur un de ces fameux bateaux et on l'a fait deux fois, la première et la dernière. À oublier complètement, on nous promettait la lune et on a vu que des barges et des chantiers abandonnés et la cerise sur le sundae, une visite aux champs de bataille de Jean Lafitte, mais on n’avait pas le temps de le visiter. Désolant! Un piège à touristes.

Le Quartier français! Un autre lieu supposément mythique à voir absolument. De très bons musiciens animent ce quartier dans cette période de carême. De la musique cajun au jazz endiablé.

Il m'a réellement impressionné par la panoplie des sons qu'il pouvait faire avec cette planche à laver!

Pour le reste, le Quartier français est une suite de restaurants, bars, prostituées, discothèques et de vendeux de bébelles. Tout le charme de ce quartier est disparu au profit de la bière 3 pour le prix d'une. Remarquez les texteux, le phénomène des téléphones intelligents est un monstre en progression, les gens ne se parlent plus, ils se textent. Être tout seul en gang!


Cela ressemble à la Saint-Jean dans le Vieux-Montréal, malheureusement rien pour écrire à sa mère. Nous avons été déçus de notre visite surtout que ce quartier fut si riche en histoire de par ses occupations créoles, espagnoles, françaises et américaines, mais on ne met pas tout ceci en évidence.

Mais alors! De quoi est-ce que je vais vous parler?

Je sais!
De la sauce Tabasco!

Toutes les sortes de sauces Tabasco sont produites et exportées à travers le monde à partir de cette petite île magnifique, "Avery Island".
Peu après la fin de la guerre civile, un Écossais (tiens donc!) Edmund Mc Ilhenny, planta des graines de piments rouges, créa un produit et fonda une compagnie qui appartient toujours à la même famille. La même recette est suivie religieusement depuis ce temps. Même le sel provient de la mine qui se trouve sous la surface de l'île.
Vous reconnaissez facilement la célèbre petite bouteille rouge, mais il y a une multitude d'autres produits allant des chips, gelées, tartinades, sauces à tartiner et même de la crème glacée. (quand je l'ai essayé, j'avais hâte que la crème glacée passe!)

Les piments ne sont récoltés que lorsque la couleur correspond à celle du "bâton rouge". Vous savez maintenant d'où vient le nom de la ville.

Mais je ne vous ai pas amené ici que pour vous parler de piments, non|! Je voulais attirer votre attention sur ce que les McIlhenny ont créé avec cette île unique. Ils ont résisté à la tentation de laisser les pétrolières la massacrer, ils ont décidé d'en faire un immense jardin où les plantes et les animaux seraient en liberté et cette famille a aussi permis de sauver de l'extinction les aigrettes des neiges, en aménageant des espaces de reproduction adaptés pour ces magnifiques oiseaux. 
Une aigrette des neiges dans sa robe nuptiale.


Les aires de reproductions sont réparées chaque année par les employés de la compagnie.
Les alligators sont aussi coopératifs en surveillant les dessous des couvoirs, histoire de ne pas laisser un petit-déjeuner leur filer entre les dents.
La loi de la nature, celle du plus fort.
Tout sur cette belle île est fait pour se compléter, l'usine cadre très bien dans le décor et même les tuyaux qui transportent le pétrole ont été enfouis ou peint en vert pour se fondre dans la nature.

Les plantations et les esclaves.

Pour ceux qui ont visionné le film "Autant en emporte le vent", vous avez tous été fascinés par la grandeur et la beauté de ces plantations de cannes à sucre et par le destin tragique des esclaves noirs capturés en Afrique et vendus à la livre à ces planteurs. Les rives du Mississippi de Baton Rouge à la Nouvelle-Orléans ont été subdivisées en lots, vendus ou offerts à de riches familles ou de militaires célèbres. La plupart de ces belles d'autrefois n'ont pas résisté à l'abolition de l'esclavage, mais je vous propose d'en visiter deux, la première pour sa beauté et la deuxième pour son histoire.


La plantation Oak Valley

Une impressionnante allée de chênes géants datant de plus de 300 ans sert de conduit naturel pour apporter l'air frais du Mississippi vers la maison des planteurs.



Construction typique du Sud, des galeries qui font le tour de la propriété avec des portes pleine-grandeur permettant à l'air de circuler.
Car ici il fait chaud en été.
Malheureusement, je n'avais pas la permission de prendre des photos de l'intérieur, mais je n'ai pas résisté à la tentation d'en prendre tout de même en cachette, surtout pour vous permettre de voir ces deux curiosités.

Un chandelier qui indique l'heure.

Comme la maison n'avait qu'une horloge et que celle-ci était généralement dans le grand salon, on avait inventé ce bougeoir pour indiquer le temps. Vous remarquerez la forme en spirale et le petit bâton fixé à la chandelle. Chaque tour de la spirale équivaut à une heure. Si on autorisait un visiteur à demeurer pour deux heures, alors on tournait la bougie à l'aide du petit bout de bois vers la deuxième spirale. Lorsque la flamme atteignait le manche du bougeoir en haut, il était temps de quitter. Ingénieux!

Un attrape-mouche discret.

Avec les réceptions et les temps chauds, il était normal d'avoir des invités non annoncés comme les mouches, alors la carafe sous la dentelle avait une ouverture sous la carafe et un liquide sucré à l'intérieur. La mouche attirée par le nectar pénétrait par le dessous et se trouvait prisonnière du liquide. La petite dentelle cachait les pauvres victimes.


Nos charmantes guides en robe d'époque.

Je n'ai jamais vu d'arbres aussi imposants,
ils peuvent vivre plus de 500 ans à ce qu'il parait.

La plantation Laura
Le monde créole
C'est mon "coup de coeur" comme ils disent à "Occupation double". Cette plantation est unique par sa construction, car à l'opposé des autres qui sont bâties avec d'énormes colonnes et en hauteur, celle-ci est sur pilotis comme les plantations des caraïbes. Elle appartenait à une famille créole. Contrairement à ce qu'on peut penser, le mot "créole" n'est pas en rapport avec les gens de couleurs, mais se rapporte à des familles françaises qui sont nées à l'extérieur de la France.
La société créole vivait en autarcie et les mariages se faisaient entre eux. Ils n'étaient pas questions de s'unir à des Américains et encore moins d'être un avocat! Une société française en Amérique.
En 1993, cette plantation en ruine et inconnue a été rachetée par un organisme pour la faire revivre. On savait qu'elle s'appelait "Laura" mais rien de plus. La beauté de cette histoire est la similitude avec mon parcours lors des recherches pour mon livre,
 "La synchronicité"

En effet, lors de la recherche pour des photos et documents concernant la "Laura" , au 33ième téléphone, ils ont eu la surprise d'entendre une voix leur dire:
" Il y a 14 ans que j'attends ce téléphone, je vous attends"

Cet inconnu gardait Plus de 5000 pages de manuscrits de la main de la dernière descendante de cette famille de planteur créole, Laura Locoul Gore. Grâce à toutes ses photos, textes et relevés de compte, nous pouvons maintenant savoir ce qui se passait sur cette plantation et ses malheurs.

Voici donc en résumé la vie sur la plantation "Laura"

Guillaume Duparc, un homme violent, avait tué le fils du meilleur ami de son père lors d'un duel en Normandie. Son père furieux lui tira dessus, mais le rata et tua sa meilleure vache. Pour se débarrasser de ce fils, il l'envoie dans la marine française. À cette époque, il était préférable d'être en prison que dans la marine française.
De par son caractère violent, il se distingua aux combats sous le drapeau espagnol, français et américain. En récompense de ses services, on lui offre une plantation sur le Mississippi. Il épouse une Créole dont la famille vient de Montréal, Nanette Prud'homme. Mais il meurt à 52 ans et laisse la plantation dans les mains de son épouse. C'est le début d'un long règne où les femmes vont diriger la plantation Laura.

Il serait trop long de tout vous raconter les faits historiques de cette plantation, car j'aurais à écrire ici les 200 pages du livre. Mais à part la terrible histoire de la "Laura", le chapitre sur les esclaves est celui qui m'a le plus captivé et révolté.


Voici les cuisines, dans ces temps on cuisinait à l'extérieur par crainte de foutre le feu à la maison des maîtres.
Voici le fameux "Code noir", lois qui régissaient la possession d'esclaves. Édicté en 1724 par Louis XIV, il impose de règles à ceux qui possèdent des esclaves, mais aussi les contraintes imposées à ces derniers. On ne parle pas ici de bétail, mais d'humains.
Exemple, un esclave se sauvait, on avait le droit de le marquer au fer rouge sur le bras, mais ici la dirigeante préférait les marquer dans le front.
La valeur marchande de l'esclave est déterminée par son âge, sa force, son sexe et son utilité. Le premier de cette liste vaut environ 150,000$ en dollars d'aujourd'hui. Une somme énorme pour nous et donc aussi pour les années 1808. Quoi faire donc pour n'avoir pas à payer pour de nouveaux esclaves? La solution que ces gens avaient trouvée fut d'acheter de jeunes esclaves féminines et de les faire engrosser chaque année comme du bétail! Ainsi, les enfants nés ne coûtaient rien et de plus étant nés sur la plantation, ils appartenaient à cette plantation et ne pouvaient pas avoir le droit de racheter leur contrat! Immonde.
Cases d'esclaves qui existent aujourd'hui. Mais plus de 60 de ces cases recouvraient une partie de la plantation. Chaque cabane abritait deux familles et ce peu importe le nombre de membres de chaque famille.


Photo de 1808 où vous pouvez voir le nombre de cases d'esclaves. Ils étaient nourris avec les restants et pour les autres repas ils devaient se cultiver un petit jardin. La journée de travail était de 18 heures, et ce, six jours par semaine. Et pas de vacances à Old Orchard.
Une "possession" de la plantation.

Vue sur la cuisine.


Chaudron pour faire cuire la canne à sucre.

Heureusement, la guerre de Sécession entre le Nord et le Sud allait sonner le glas de ce commerce de chair humaine. En 1865, le Sud capitule et les esclaves deviennent libres. Le planteur doit les payer 18$ par mois, les nourrir et les loger. Le travail du dimanche est interdit, mais en douce on offre une surprime pour ceux qui se laissent tenter. Mais le prix du sucre est en baisse et le salaire payé aux esclaves ne permet plus de faire assez de profit sur leurs dos. La plupart des plantations seront vendues ou abandonnées. Le 14 mars 1891, la plantation est vendue pour trois fois rien.

Ces belles d'autrefois nous ravissent par leurs beautés, mais cette grandeur s'est construite sur les dos de pauvres gens qui avaient tout simplement la mauvaise couleur de peau. Je souhaite longue vie à la fondation "Laura" pour que nos enfants et nos petits-enfants puissent connaître ce pan de notre histoire pas toujours glorieux. En passant, nous aussi à Montréal nous avions des esclaves, mais  on en parle pas trop.
Nous espérons que vous avez aimé cette chronique même si vous pouviez percevoir dans mes mots mon indignation, mais que pouvais-je y faire?

Pour terminer sur une note plus légère, vous dites souvent que Carole et moi nous sommes aventureux et bien nous avons rencontré des gens qui nous ont renversés.
Michel et Bernadette

Des Français que nous avons rencontrés en Louisiane. Ils sont sur la route pour 3 années à bord de la "Cagouille". Une jeep Toyota des années 1986, car elle est toute atmosphérique, aucune pièce électronique à bord. Pourquoi? Ils ont traversé tout le continent africain du Maroc jusqu'au Cap, puis mis cet engin à bord du bateau pour la Floride. Ils vont traverser les É.-U. jusqu'en Californie et descendre toutes les Amériques jusqu'en Terre de Feu! Et avec des cartes russes!

Une belle rencontre des gens formidables.
On vous souhaite une belle route et espérant vous revoir!